Rade de Genève

Genève GE, 500/118, 370 m

 

Paul Géroudet à la Jetée des Pâquis, septembre 1986
Photo : A. Barbalat

Avec son orientation sud-ouest et les deux massifs montagneux qui l’enserrent, la pointe du Léman se transforme chaque automne en entonnoir canalisant le flot des migrateurs. Un grand nombre d’entre eux y passeront même l’hiver, contribuant à la renommée ornithologique internationale des lieux.

La Rade de Genève est délimitée par le pont du Mont-Blanc en aval et par les jetées des Pâquis et des Eaux-Vives en amont. Nous parlons aussi de la «Grande Rade» qui s’étend jusqu’à la Perle du Lac en rive droite et le port Noir en rive gauche. La situation géographique du site lui confère un intérêt majeur pour le passage des migrateurs automnaux et l’hivernage des oiseaux d’eau. La Rade, qui accueille un très grand nombre de canards à la saison froide, est inscrite à la convention Ramsar des zones humides d’importance internationale pour la conservation des oiseaux d’eau.

De mi-juillet à fin octobre, le meilleur point d’observation se situe sur la jetée des Pâquis (et de manière secondaire sur la jetée du jet d’eau). Les sessions d’observations les plus prolifiques se font lors des épisodes de mauvais temps ou à la suite d’intempéries, mais les journées ensoleillées amènent aussi leur lot de belles rencontres. Il est intéressant de s’y rendre dès les premières lueurs du jour, avant l’afflux des baigneurs et promeneurs venant profiter du lac. Cela offre parfois la possibilité de repérer des limicoles posés sur les plages, la jetée ou les enrochements ou passant simplement en vol. Bien que la migration s’observe toute la journée, il est aussi plus agréable d’observer pendant la matinée. Les deux limicoles les plus communs sont le Chevalier guignette, que l’on peut parfois observer en groupes comptant jusqu’à une vingtaine d’individus, et le Bécasseau variable. Passent aussi de manière régulière les Chevaliers sylvain, culblanc et aboyeur, les Courlis cendré et corlieu et le Combattant varié. Plus rarement, Tournepierre, Huîtrier, Pluviers argenté ou doré, Barges rousse ou à queue noire et autres bécasseaux ou chevaliers font le bonheur de l’observateur fidèle.

Il est aussi possible d’observer, au petit matin, les nombreux laridés dormant sur les balises délimitant la zone de natation. Les Mouettes mélanocéphales sont relativement communes et il est possible d’en voir en nombre certaines années. En fin d’été s’y mélangent aussi quelques Sternes pierregarins et plus rarement caugeks, ainsi que des Guifettes noires et parfois leucoptères. L’observateur attentif réussira peut-être à repérer un Goéland brun ou une Mouette pygmée, voire une autre espèce plus rare. Chaque année passent quelques labbes et Sternes caspiennes, alors qui sait ? La Mouette de Sabine a par exemple déjà été signalée.

La vue dégagée depuis la jetée est également très propice à l’observation des rapaces. Lors de belles journées en particulier, mais aussi par temps mitigé, scrutez attentivement le ciel. Busards des roseaux, Balbuzards pêcheurs et Bondrées apivores peuvent passer un peu partout, que ce soit en rive gauche, rive droite, ou même au-dessus de vos têtes. Les Busards cendrés et Saint-Martin sont occasionnels. Souvent, les Faucons hobereau et pèlerin s’arrêtent chasser dans la Rade, ce dernier étant régulièrement observé sur les antennes et autres points élevés de la ville.

Après avoir observé la migration à la Jetée des Pâquis, il peut être intéressant d’aller aussi faire un tour sur le quai Wilson ou à Baby plage qui proposent de bons reposoirs pour les limicoles en migration. Entre ce lieu et le port Noir, la nouvelle plage des Eaux-Vives ouverte en 2019 est aussi devenue une zone très intéressante pour l’escale de ces oiseaux.

Avec l’avancée de la saison, vous augmenterez vos chances de voir des groupes de canards arrivant du large, comprenant Sarcelles d’hiver, Canards souchets, siffleurs et pilets ainsi que des Fuligules morillons et milouins ou d’autres espèces plus rares. Toutes sortes de surprises automnales peuvent récompenser l’observateur à la Rade, allant du Cassenoix moucheté au Hibou des marais en passant par les Grues !

En hiver, toute la Rade mérite une visite. De très nombreux Fuligules morillons et milouins, Nettes rousses et Poules-d’eau passent la mauvaise saison dans les ports. Dès le mois de décembre, les Goélands cendrés sont facilement observables tout autour des quais. Un passage au port des Eaux-Vives vous offrira de très belles observations de Fuligules nyrocas, dont le rassemblement peut atteindre la vingtaine d’individus au cœur de l’hiver. Parfois, quelques rares Fuligules milouinans se mêlent aux morillons.

Le secteur compris entre la Perle du Lac, le quai Wilson et le port Noir s’avère très intéressant pour les canards. Non loin des rives, on découvrira sans peine quelques groupes de Garrots à œil d’or et parfois de Sarcelles d’hiver, Canards souchets, siffleurs et chipeaux. Plus rarement, le Tadorne de Belon peut faire son apparition. Un « scan» en direction du large vous réservera d’autres surprises : Eiders à duvet, Macreuses brunes ou noires, voire même quelques Hareldes boréales passent une partie de l’hiver dans le secteur. Quelques Harles huppés se tiennent ici ou là près des rives et de grands groupes de Grèbes à cou noir se rapprochent aussi parfois. Parmi eux, vous pourrez chercher le Grèbe esclavon qui leur tient parfois compagnie. Le quai en rive gauche, en direction de la rampe de Vésenaz, peut également s’avérer riche en espèces rares. Plongeons arctiques, catmarins et Grèbes jougris y sont parfois observés.

Parmi les raretés notées dans le secteur, mentionnons la Mouette tridactyle ainsi que les Goélands argentés et pontiques. Il arrive qu’en fin d’automne et pendant l’hiver, un Phalarope à bec large fasse une apparition dans la Rade. Un Bécasseau violet a même ravi de très nombreux observateurs en novembre 2006. À deux reprises, un Fuligule à bec cerclé a hiverné au port des Pâquis.

La migration présente nettement moins d’intérêt au printemps. La majorité des espèces visibles en automne peuvent se rencontrer, notamment chez les canards, mais de manière beaucoup plus diffuse. Entre fin avril et début mai, des groupes de Mouettes pygmées, Sternes pierregarins, Guifettes noires et moustacs sont parfois visibles au large. Très rare dans la Rade, un Harle piette y a été vu en mars 2019.

Mentionnons aussi la présence de nombreux anatidés exotiques échappés de captivité en aval du pont du Mont-Blanc. La liste des espèces (qui parfois s’hybrident entre elles) est longue et ces canards et oies parfois étranges font des incursions régulières dans la Rade, pouvant induire en erreur l’observateur non averti.

Accès

En transports publics, le pourtour de la Rade est bien desservi par de nombreuses lignes et il est toujours intéressant de marcher le long des quais, ceux-ci étant accessibles en 10 minutes à pied depuis la gare Cornavin.

Vous pouvez également emprunter les différentes lignes de «Mouettes genevoises» qui vous permettent d’accéder facilement à la rive opposée en bateau.

Le vélo est une très bonne alternative pour se déplacer dans le secteur. En quelques coups de pédales vous pourrez ainsi atteindre les différents points d’observations que vous souhaitez visiter.

En revanche, la voiture est peu adaptée en ville de Genève. Il existe des places en zones bleues à l’intérieur du quartier des Pâquis et des Eaux-Vives, mais celles-ci sont souvent occupées et les parkings souterrains sont onéreux.


D’après ©Les Bons Coins ornithologiques de Suisse Romande 2021 - Groupe des Jeunes de Nos Oiseaux
Texte de Alexis Pochelon (adapté de Cyril Schönbächler)

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