Etournel

Pougny, Collonges F01, Chevrier F74, 484/110, 350 m

 

Passé la frontière, le Rhône désormais français entame son cours de la plus belle des manières : retrouvant un aspect naturel, il longe quelque 200 hectares de zones humides où la biodiversité s’épanouit en toute quiétude, bien loin du brouhaha genevois.

Situé entre les départements de l’Ain et de la Haute-Savoie, l’Étournel est depuis longtemps une réserve nationale, où la chasse est interdite. D’amont en aval (3 km), on trouve d’abord plusieurs étangs entourés d’une riche végétation, hérités d’une ancienne gravière et dont certains sont en contact avec le Rhône. Plusieurs observatoires et autres aménagements destinés à l’observation des oiseaux y ont été aménagés. Vient ensuite un bois constitué surtout de saules, d’aulnes et de peupliers, avec un sous-bois dense laissant quelques clairières ici et là, et qui se transforme progressivement en une vaste roselière bordant une zone d’inondation, près de la Ferme des Isles. La présence de bancs de sable dépend des variations assez importantes du fleuve, provoquées par les barrages de Génissiat et de Chancy-Pougny. Le Rhône lui-même est assez large et abrite plusieurs îles bien boisées et peu accessibles.

Plus en aval, sur la rive gauche, se trouvent des roselières plus petites et des îlots inondables ; en retrait sur les deux rives, quelques prairies sèches, des champs cultivés, des prés et des bois entourent le site. Grâce à sa richesse en biotopes et à sa situation stratégique sur une voie principale de migration, l’Étournel est d’une grande importance pour les migrateurs et les hivernants, ainsi que pour les oiseaux nicheurs. Quelque 240 espèces d’oiseaux y ont été notées, auxquelles il faut ajouter une flore très spécifique, de nombreux odonates, des batraciens et des mammifères.

Les visites à cette réserve permettent souvent de belles observations, en toutes saisons. Côté ardéidés, le Héron cendré et le Blongios nichent sur le site tandis que le Pourpré, le Bihoreau et l’Aigrette garzette sont des migrateurs réguliers d’avril à juin. Le Crabier se montre plus rarement, généralement en mai. La Grande Aigrette est elle aussi devenue un hôte régulier, principalement en automne et en hiver. Pendant la même période, un Butor peut être surpris au bord d’un étang ou dans une roselière.

Si seuls le Canard colvert et le Harle bièvre nichent, toutes les espèces de canards peuvent être observées sur le Rhône et aux étangs, avec souvent bon nombre de Siffleurs, Chipeaux et Sarcelles d’hiver (environ 200 hivernants) pendant la mauvaise saison. Le Garrot et les Fuligules morillon et milouin hivernent également sur le Rhône, tandis que le Souchet, le Pilet, la Sarcelle d’été et la Nette rousse s’y arrêtent plutôt aux deux passages. Le Milan noir est de loin le rapace le plus caractéristique du site, avec notamment des rassemblements de centaines d’oiseaux en mars-avril. Éperviers, Buses et Bondrées nichent aux alentours ; parfois, la visite d’un Faucon pèlerin, d’un Autour ou même d’un Circaète vient semer la panique parmi les oiseaux. L’automne voit arriver le Faucon hobereau et le Balbuzard, qui aiment chasser le long du Rhône, puis le Busard Saint-Martin ou le Faucon émerillon pour la saison froide, quoique plus rarement. Précisons que le site de migration de Fort l’Écluse est tout proche !

La Gallinule poule-d’eau et le Râle d’eau nichent au bord des étangs et dans les marais, tandis qu’une marouette en migration, toujours très discrète, peut s’y arrêter. Toute la gamme des limicoles (chevaliers, gravelots, courlis, bécasseaux, bécassines…) peut fréquenter le site en période de migration, principalement à deux endroits : aux étangs de Pougny et sur les vasières de la Ferme des Isles et de la rive droite (entre l’écurie et le pont Carnot, seul pont en aval de l’Étournel avant le défilé de Fort l’Écluse). Toutefois, il se peut que les bancs de sable soient entièrement inondés… Signalons encore quelques visiteurs prestigieux qui ont été observés à l’Étournel : Pluvier guignard, Bécasseau falcinelle et Chevalier stagnatile. Seul nicheur, le Petit Gravelot se reproduit aux étangs, avec plus ou moins de succès ; le Courlis cendré, toujours observé en migration, a depuis longtemps disparu comme nicheur. Les laridés sont également bien représentés : aux espèces omniprésentes que sont Goélands leucophées et Mouettes rieuses s’ajoutent parfois une Mouette mélanocéphale, des Goélands cendrés (en hiver) et quelques Sternes pierregarins, venues chasser depuis leur site de reproduction de Verbois. Quelques guifettes (trois espèces) ou Sternes caugeks ou naines peuvent parfois créer la surprise, aux étangs de Pougny ou sur les eaux du Rhône, et plus rarement encore la Sterne caspienne ou la Mouette pygmée. La Mouette tridactyle, le Labbe parasite et la Sterne hansel constituent l’exception.

Chez les passereaux, en marge des espèces communes (mésanges, pouillots, fringillidés, etc.), les nicheurs locaux les plus intéressants sont la Tourterelle des bois, le Loriot, le Torcol et le Martin-pêcheur. Emblématique lui aussi, le Rossignol se rencontre en fortes densités un peu partout dans la réserve, tandis qu’une colonie d’Hirondelles de rivage occupe de longue date une gravière à Pougny Gare. Celles-ci viennent régulièrement se nourrir aux étangs, où elles se mêlent à de grandes troupes d’Hirondelles rustiques et de fenêtre. Les roselières abritent de nombreuses Rousserolles effarvattes. La Verderolle et la Turdoïde sont plus rares et le Bruant des roseaux semble avoir disparu des lieux. L’Hypolaïs polyglotte et la Fauvette grisette habitent les endroits plus secs, notamment le long du chemin de fer. Les Bruants jaune, zizi et proyer sont aussi à rechercher autour des cultures et dans les prairies sèches (coteaux au nord et au sud du site). Ces prairies abritent également plusieurs couples de Tariers pâtres et Pie-grièches écorcheurs ; nicheur jusqu’au début des années 2000, le Pipit des arbres n’est aujourd’hui plus que de passage. Parmi les autres migrateurs, la Bergeronnette printanière et la Huppe sont régulières dans les champs ou sur les rives. Par contre, c’est dans les marais et autour des étangs qu’il faudra rechercher une éventuelle Rémiz penduline, une Locustelle tachetée ou un Phragmite des joncs en escale. Une Fauvette babillarde, des Pouillots siffleur ou de Bonelli peuvent être vus et surtout entendus au printemps.


Accès

Sans voiture ou vélo, l’accès aux différentes parties de l’Étournel n’est pas très aisé et il faut prévoir une journée pour visiter le site dans son ensemble.

Depuis Genève, un bus atteint Chancy (terminus) d’où il reste 2km à parcourir le long de la route jusqu’aux étangs : traverser le Rhône, passer la douane et suivre la direction Pougny et Collonges ; avant le village, au croisement (facilement reconnaissable à la grande hélice hydraulique qui y trône), prendre à gauche et traverser le hameau de l’Étournel. Il faut ici passer au-dessus du chemin de fer et continuer jusqu’aux barrières où il est possible de se garer.

Différents panneaux d’information s’offrent alors aux visiteurs et les premiers étangs sont très rapidement accessibles. En suivant les chemins agricoles au nord de la ligne de chemin de fer, il est possible de rejoindre la roselière et les rives du Rhône du côté de la Ferme des Isles en une vingtaine de minutes à pied. Dans tous les cas, veuillez respecter les sentiers balisés pour éviter les dérangements.

Sur la rive savoyarde (en voiture, voire à vélo), plusieurs points de vue sur le Rhône et sur la rive d’en face sont accessibles depuis la route menant à l’écurie (commune de Vulbens).

La meilleure saison pour visiter l’Étournel va d’avril à juin, surtout tôt le matin afin d’observer non seulement l’avifaune mais aussi d’autres animaux : l’Étournel abrite de bonnes populations de cerfs (qui se montrent toutefois plus facilement en automne/hiver), chevreuils, sangliers et castors. Le renard et le blaireau sont également présents.


D’après ©Les Bons Coins ornithologiques de Suisse Romande 2021 - Groupe des Jeunes de Nos Oiseaux
Texte de Jérémy Savioz (adapté de Bram Piot)

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